Alors que
les Etats généraux de la démocratie territoriale s’ouvriront les 4 et 5 octobre
avec le rendu au Sénat du grand questionnaire envoyé aux élus locaux par la
haute Assemblée.
Dans toute
démocratie, une réforme des collectivités locales ne peut se concevoir qu’à
tous ses échelons. Quitte à en supprimer certains. Elle doit également
s’effectuer du bas vers le haut afin d’emporter l’adhésion du plus grand
nombre.
Voici 10 propositions
de réforme de la démocratie française.
1 non-cumul des mandats, dans
l’espace et le temps
Un
mandat électif, quel qu'il soit, représente une masse de travail considérable
pour un élu. S'il cumule, il devra multiplier les collaborateurs. Ceux-ci sont
souvent très bons mais, hélas, leur inflation éloigne l'élu de ses mandants.
Il
est de bon ton, pour de très nombreux députés cumulards, de dégainer l'argument
suivant : «Je suis un député ancré dans le terrain puisque j'ai un ou plusieurs
mandats locaux. Dans le cas contraire, je serai tout le temps à Paris.» Mais
heureusement qu'un député (ou un sénateur) est souvent à Paris ! Un
parlementaire est avant tout un législateur. Il est là pour élaborer et
proposer des lois, non pour faire la super assistante sociale pour le compte
d'un territoire.
Le
mode de scrutin a tendance à favoriser le cumul. L'élection par circonscription
accroit ce clientélisme territorial, éclipsant un principe fondamental de la
démocratie représentative : un député français détient un 577e de souveraineté
nationale, et ne représente pas un territoire.
Cependant,
les hommes politiques ne sont pas seuls responsables de cet état de fait. Ceux
désirant sincèrement réduire le cumul sont plus nombreux qu'on ne le pense.
Mais la pression au cumul peut également venir du terrain. Nombreux demeurent
les électeurs attachés à l'idée d'envoyer qui son maire ou qui son conseiller
général à l'Assemblée ou au Sénat pour «défendre» des dossiers locaux.
Bref,
les mentalités évoluent mais le chemin est encore long...
Pour
finir, la limitation du cumul est également souhaitable dans le temps. Le seul
mandat vraiment unique sous-entend une non-rééligibilité... quitte à l'allonger
dans le temps. Un élu sachant qu'il n'aura pas à batailler en fin de mandat
pour sa reconduction aura davantage à coeur de travailler pour l'intérêt général
et non une somme d'intérêts particuliers et clientélistes.
La
fin du cumul des mandats dans l'espace et le temps aura ainsi pour mérite de
susciter un «turn over» plus important des élus, favorisant la parité, la
jeunesse et la «diversité». Il pourrait ainsi marquer la fin des
«professionnels de la politique» puisqu'il les obligera à songer à leur
reconversion et donc leur statut durant leur mandat.
2 Une véritable
comptabilité des votes blancs
Une
première mesure pour réconcilier mandants et élus serait d’effectuer une
comptabilité séparée des votes blancs et des votes nuls. Voter blanc, c’est
exprimer l’opinion que l’offre électorale ne convient pas au votant. Voter nul,
c’est soit rejeter purement et simplement cette offre, soit tout simplement
avoir commis une erreur lors des opérations de vote. La démarche n’est pas du
tout la même !
Il
convient donc de comptabiliser les votes blancs, comme indiqué dans les
propositions 3, 7, 8 et 9 (mandat conditionnel)
.
3 Des fédérations de communes
La commune
est la brique de la démocratie française. Le grand nombre de communes n’est pas
forcément un handicap. Le fait que de petits groupements humains, ne dépassant
quelquefois pas quelques dizaines de citoyens, puissent élire leur représentant
est un signe de vitalité démocratique et d’implication dans la vie politique.
Le problème
ne vient pas en fait du nombre de communes, mais de leurs compétences, que les
plus petites d’entre elles ont du mal à tenir du fait d’un manque de moyens
humain et financier. Ce sont ces compétences qu’il faut ventiler, et non les
communes qu’il faut fusionner, les expériences du passé ayant largement
démontré les limites de cet exercice, surtout quand il était pratiqué de
manière autoritaire.
La solution
réside dans une intercommunalité rénovée. Elle pourrait s’appuyer sur la loi
PLM de 1982, qui a démontré une certaine efficacité dans les arrondissements
parisiens et lyonnais et dans les secteurs marseillais.
En clair,
les communes garderaient leurs conseils et leurs maires, à l’instar des
arrondissements. Le conseil intercommunal serait élu en même temps que les
conseils municipaux, suivant un système de fléchage inspiré de celui de la loi
PLM, tout comme le conseil de Paris.
Une fois
créées, ces intercommunalités pourront garder une grande souplesse dans leur
périmètre. Celui-ci pourra être révisé par une commission indépendante qui
s’appuiera sur des données objectives (démographie, bassins d’emploi,
géographie, histoire…) pour avaliser l’adhésion ou le départ de certaines
communes de la structure. Deux réserves seront émises a priori : ces communes
devront se trouver à la périphérie de l’entité, afin de garantir sa continuité
territoriale, et les partantes devront obligatoirement et immédiatement adhérer
à une entité voisine. Le changement d’entité sera déclenché par un referendum à
la majorité absolue, après décision, toujours à la majorité absolue, du conseil
municipal, de l’organiser.
On pourrait
alors dénommer ces entités fédérations de communes.
Un délicat
équilibre devra être trouvé entre la cohérence géographique, historique et
démographique des fédérations de communes et l’histoire de l’intercommunalité
des territoires qu’elles recouvriront. Les structures intercommunales actuelles
se sont le plus souvent créées autour de communes ayant eu l’habitude de
travailler ensemble, et quelquefois aussi selon les affinités politiques du
moment. Ce qui fait que, par exemple, certaines unités urbaines se retrouvent ou
se sont retrouvées éclatées entre deux intercommunalités, malgré la continuité
du bâti et les flux de population en son sein.
Il sera
également nécessaire d’englober dans les fédérations de communes les différents
syndicats à vocation multiple et unique existant encore. Ne devraient subsister
que ceux dont le périmètre géographique sera plus étendu que la fédération de
communes.
Mode de scrutin
La
circonscription de base est la commune, avec le cas échéant la commune
associée.
Chaque
circonscription élit son propre conseil municipal.
En-dessous
de 2500 habitants, scrutin de liste non bloquée, avec possibilité de
candidatures individuelles. Sont élus les candidats ayant obtenu au moins 50 %
des exprimés VBC (votes blancs compris) plus une voix au premier tour, au
second tour les candidats restants sont élus à la majorité simple. Les
nouvelles candidatures sont impossibles au second tour.
Pour les
communes de plus de 2500 habitants, scrutin de liste bloqué. Ne peuvent se
présenter au second tour que les listes ayant obtenu au moins 10 % des exprimés
VBC. Peuvent fusionner au second tour celles ayant obtenu au moins 5 % des
exprimés VBC. Au second tour, 50 % des sièges du conseil municipal sont
automatiquement attribués à la liste arrivée en tête. Le reste des sièges est
attribué à la proportionnelle à la plus forte moyenne.
Les sièges
au conseil de fédération sont attribués à chaque commune, proportionnellement à
leur poids démographique.
Concernant
celles de moins de 2500 habitants, sont fléchés les conseillers ayant obtenu le
plus de voix sur leur nom, aux deux tours. Concernant les autres, la moitié des
sièges est attribuée aux premiers de la liste arrivée en tête, les autres
sièges étant distribués à la proportionnelle.
Les
conseillers municipaux et de fédération seraient élus pour un mandat de six ans
non renouvelable, et sans possibilité de se représenter ultérieurement.
En cas de
décès, de démission ou tout autre empêchement, chaque élu serait remplacé par
son suivant de liste, aussi bien au conseil municipal qu’au conseil de
fédération. Pour les communes de moins de 2500 habitants, des élections
municipales complémentaires seraient organisées au bout de quatre empêchements.
Concernant le fléchage, le conseiller empêché serait remplacé par le suivant en
nombre de suffrages.
4 Des forums de quartier et de
hameau
Le transfert
d’une partie du pouvoir communal vers les fédérations de communes devra
s’accompagner d’un renforcement de la démocratie participative. Cette dernière
s’exprimera à travers des forums de quartier dans les agglomérations et de
hameau dans les zones à habitat dispersé. Leurs décisions devront être
obligatoirement examinées par le conseil municipal, qui devra se prononcer par
un vote. Ils auront également la possibilité de révoquer des élus, suivant une
procédure transparente.
Ces forums
auront enfin une fonction d’éducation civique. Les jeunes pourront y siéger à
partir de 16 ans, sans toutefois pouvoir les présider. Ils pourront également
accueillir des résidents étrangers depuis plus de trois ans, ce qui constituera
un point de départ concret au débat sur la participation des immigrés hors
Union européenne à la vie politique locale.
La moitié
des participants serait élue pour six ans non renouvelables, selon le même mode
de scrutin que les communes de moins de 2500 habitants. Cependant, les
élections interviendront à mi-mandat des municipales. Les autres élus et
anciens autres élus n’auront pas le droit de se présenter.
L’autre
moitié serait tirée au sort sur les listes électorales. Les autres élus
seraient exclus de ce tirage au sort.
5 Un Grand Paris avec des
satellites urbains et périurbains
Comment
gérer une région très peuplée, quasiment entièrement urbaine et périurbaine, et
abritant l’une des plus grandes agglomérations européennes ?
Une solution
pourrait être envisagée.
Garder la
région telle quelle en effectuant les ajustements nécessaires pour réunifier
les agglomérations interrégionales (Creil, Malesherbes…). Cependant,
l’agglomération parisienne serait divisée en six fédérations de communes : le
centre, reprenant les contours du Grand Paris, et cinq satellites. Ces derniers
seraient organisés autour des villes nouvelles créées après la réforme
Delouvrier de 1964 : Cergy-Pontoise pour la partie Val-d’Oise de l’agglomération,
Evry pour l’Essonne, Melun-Sénart pour le sud de la Seine-et-Marne,
Marne-la-Vallée – Val-Maubuée pour le nord de la Seine-et-Marne, et
Saint-Quentin-en-Yvelines pour les Yvelines. Les zones urbaines non comprises
dans la continuité du bâti formeraient leurs propres fédérations de communes :
Meaux, Rambouillet, Beaumont-sur-Oise… Cette solution permettrait au conseil
régional de subsister avec des pouvoirs élargis en matière d’aménagement.
6 Supprimer les départements
Ce sera sans
doute le point le plus difficile à aborder dans une éventuelle réforme. Le
département est-il l’échelon à supprimer ? Beaucoup d’éléments convergent en
faveur de sa disparition. Conçu en 1790 pour placer chaque centre administratif
à une journée de cheval, il est, à cet égard, obsolète depuis le développement
du chemin de fer sous le Second Empire. L’argument avancé par nombre de
présidents du conseil général selon lequel le département est indispensable
parce qu’il traite des questions sociales avec proximité ne tient pas. Il
suffit de ventiler ces compétences aux fédérations de communes pour retrouver
les services et la proximité.
7 Renforcer les régions
Les
arguments en la faveur des « grandes régions » tiennent peu la route
: on fusionnerait certaines régions pour qu’elles deviennent « à dimension
européenne ». Une notion très vague, fondée, comme beaucoup de lieux communs,
sur un prétendu « déclin » ou « retard » de la France sur ses voisins européens.
Les régions
françaises sont comparables en surface aux provinces espagnoles, italiennes ou
aux Lander allemands. Ces derniers se basent sur une évolution historique, et
quelquefois même des réalités culturelles. Ils ne sont pas tous peuplés au
minimum de 3 ou 4 millions d’habitants : Brême en Allemagne, La Rioja en
Espagne, le Val d’Aoste en Italie…
Cela ne
signifie pas qu’il ne faille rien toucher. Certains ajustements seront même
nécessaires. Faut-il garder deux Normandies ? On pourrait aussi régler la
question de l’enclave des papes en l’englobant dans l’arrondissement de Nyons,
et en basculant le tout soit dans Provence – Alpes – Côte-d’Azur, soit
Rhône-Alpes. Il sera également nécessaire de revoir le tracé des limites
régionales, pour réunifier certaines agglomérations comme Alençon, Redon,
Mâcon, Beaucaire ou Aire-sur-l’Adour… Cette modification des tracés régionaux pourrait
se faire à l’instigation des collectivités locales et après un vote de ces
dernières ou un referendum local, et non plus après un vote du Parlement.
Pour en
revenir à la dimension régionale, la véritable révolution serait de donner
davantage d’autonomie et de compétences aux régions. Une piste intéressante
pourrait être le statut actuel de la collectivité territoriale de Corse, sans
pour autant entrer dans le débat sur les langues régionales et sur les
dérogations fiscales. Ceci sans accroître les inégalités entre les régions, en
mettant un place une véritable politique de péréquation, l’Etat devant assurer
l’égalité entre les citoyens et la continuité territoriale des services publics.
Mode de scrutin
Les fédérations
de commune constitueront la circonscription électorale des conseillers
régionaux. Pour assurer un rééquilibrage en faveur des zones urbaines, on peut
imaginer quatre modes de scrutin. Les fédérations constituées par la capitale
régionale éliraient dix conseiller régionaux à la proportionnelle intégrale à
la plus forte moyenne, avec un seuil d’éligibilité à 5 % des exprimés VBC. Une
métropole, ou une zone très urbanisée, élirait quatre conseillers. Celles ayant
en leur centre une petite ville en désigneraient deux. Quant aux zones rurales,
elles auraient un conseiller élu au scrutin uninominal majoritaire à deux
tours.
Pour cette
dernière catégorie serait appliqué le mandat conditionnel. Pour être élu au
premier tour, le conseiller régional rural devra obtenir au moins 50 % des
exprimés VBC plus une voix. Si, au second tour, il arrive en tête sans
atteindre ce score, il ne pourra siéger que durant un demi-mandat. A l’issue de
ce dernier, un vote sera organisé. Si le conseiller est confirmé par 50 % des
exprimés VBC, il terminera son mandat. Dans le cas contraire, une nouvelle
élection est organisée dans le mois. Ce système suppose bien sûr que ne seront
qualifiés pour le second tour que les deux candidats ayant obtenu le plus de
suffrages au premier.
Les
conseillers seraient élus pour un mandat de six ans non renouvelable, et sans
possibilité de se représenter ultérieurement.
Pour les
conseillers élus à la proportionnelle, le suivant de liste fait office de
suppléant. Ceux élus au scrutin majoritaire se présenteront avec un suppléant.
8 Un Sénat représentant les
collectivités
Tout en
gardant leurs prérogatives actuelles, les sénateurs seraient élus pour un
mandat de neuf ans non renouvelable, et sans possibilité de se représenter
ultérieurement. Il y aurait quatre sénateurs par région, selon la typologie
définie en proposition 7 : un élu par la fédération de commune ayant en
son centre la capitale régionale, un par les fédérations très urbanisées, un
par les fédérations avec une ville en leur centre et un par les fédérations
rurales.
Chaque
sénateur serait élu au scrutin majoritaire uninominal à deux tours, avec le
système de mandat conditionnel en cas d’élection avec moins de 50 % des
exprimés VBC plus une voix.
En cas
d’empêchement, le sénateur est remplacé par son suppléant.
9 Un député pour 100 000
habitants
La réforme
porterait surtout sur le mode de scrutin.
Chaque
région élirait un député par tranche de 100 000 habitants. Leur nombre
pourrait donc varier à chaque élection suivant un recensement.
Le mode de
scrutin serait mixte et à un seul tour. Les candidats devront se présenter par
ordre alphabétique sur des listes comportant autant de noms qu’il y a de sièges
à pourvoir.
Les
électeurs auraient la possibilité de barrer des noms et de panacher les listes.
Seraient donc élus les candidats ayant obtenu le plus de voix sur leur propre
nom.
La durée du
mandat serait de six ans non renouvelable, sans possibilité de se représenter
ultérieurement.
En cas
d’empêchement, le suppléant serait le suivant de liste, en suffrages.
Les députés
ayant obtenu moins de suffrages que de votes blancs au niveau régional seraient
soumis à la procédure du mandat conditionnel.
10 Un président-arbitre libéré de la
tentation de l’homme providentiel
Six
ans après l’exécution de Louis XVI, la France s’offrait un premier « homme
providentiel » en Napoléon Bonaparte. Ce fut le début d’une longue série,
pour le meilleur et pour le pire : Louis XVIII, Louis-Philippe, Louis-Napoléon
Bonaparte, Clémenceau, Poincaré, Pétain, Mendes-France, de Gaulle… D’autres
auraient bien aimé revêtir cet habit de lumière, comme le général Boulanger,
Pierre Poujade ou Jean-Marie Le Pen…
Cette
tendance a toujours existé, quel que soit le régime en place. A croire qu’après
avoir tué le père, physiquement et psychologiquement, le 21 janvier 1793, les
Français refoulaient sans cesse cet acte oedipien en se cherchant un père (ou
une mère) de substitution.
Cela
se manifeste surtout lors des déchirements nationaux, comme la perte de
l’Alsace-Moselle, la défaite de 1940 ou la guerre d’Algérie.
Le
régime actuel, la Ve République, né justement lors de ce dernier conflit, a
même eu tendance à l’institutionnaliser, avec son élection présidentielle au
suffrage universel direct, « rencontre entre un pays et un homme »…
Poser
la question de la légitimité démocratique de ce scrutin s’avère risqué. Les
taux de participation de 2007 et 2012 semblent attester que les Français sont
attachés à cette élection. Ce serait oublier un peu vite que, tout découlant de
la présidentielle, il est normal que les citoyens s’investissent davantage dans
ce rendez-vous électoral qui rythme la vie démocratique du pays.
Mais
désigner une femme ou un homme pour en représenter 65 millions d’autres, est-ce
encore totalement démocratique ? Surtout avec de tels pouvoirs. Car
contrairement à une idée répandue, le président de la République français
détient davantage de prérogatives que celui des Etats-Unis d’Amérique, qui doit
sans cesse composer avec la majorité au Congrès. Sans oublier que, si cette
dernière peut déclencher une procédure de destitution à son encontre, il lui
est en revanche impossible de la dissoudre.
En
France, c’est le contraire, et le fameux article 16 sur les pleins pouvoirs en
cas de crise, même atténué par la réforme constitutionnelle de 2008, reste
sujet à caution.
Certains
détracteurs de la Ve République parlent même de « monarchie
élective »… Ce qui fait dire à d’autres détracteurs, louchant vers
certains de nos voisins européens, que l’idéal serait une monarchie
parlementaire, avec un chef de la majorité, un chef de l’opposition et un
arbitre au-dessus de la mêlée. La plupart oublie de préciser quelle famille
tiendrait ce rôle, forcément dynastique : Capet, Capet de la maison d’Orléans,
Bonaparte ?
Plus
sérieusement, une solution réellement républicaine est envisageable. Dans
l’Histoire de France, le président n’a pas toujours été omnipotent. Le problème
de la IIIe, et surtout de la IVe République, n’était pas tant que ce président
« inaugurait les chrysanthèmes », que les partis se décrédibilisaient
et s’épuisaient dans des combinaisons électorales et politiciennes bien loin
des préoccupations des citoyens. Une tambouille réchauffée par des modes de
scrutin peinant à imposer une majorité stable.
Le
Chef de l’Etat, s’il doit endosser le maillot d’arbitre, ne pourra le faire que
si au moins une des chambres du Parlement, celle qui a le dernier mot, dégage
une majorité, ou à défaut une coalition claire. Autre condition : si le chef du
gouvernement détient l’essentiel des pouvoirs, par le truchement du suffrage
universel, il ne peut entrer en concurrence avec un Chef de l’Etat légitimé par
le même suffrage.
Sous
la Ve République, cela s’est produit trois fois, lorsque François Mitterrand,
puis Jacques Chirac, ont perdu leur majorité parlementaire et ont du composer
avec un Premier ministre issu du camp opposé… Loin de constituer un
contre-pouvoir, cette concurrence de légitimité instaure un exécutif
conflictuel.
Un
président arbitre de la Nation, garant de la Constitution, des valeurs de la
République, véritable modérateur du débat public, détenant l’autorité sans le
pouvoir, pourrait être élu par un collège de grands électeurs, pour un mandat
d’un an renouvelable cinq ou sept fois, mais sans discontinuité. Il (ou elle)
serait choisi(e) sur une liste d’anciens élus.
Il
est possible d’imaginer un collège de grands électeurs composé par tous les
anciens élus de la République.
Mais
comme tout bon patient en analyse, pour évacuer une bonne fois pour toutes son
complexe d’Oedipe, le pays devra effectuer un important travail sur lui-même. A
savoir réformer sa gouvernance de fond en comble : instiller une dose de
majoritaire dans la proportionnelle (et non le contraire…), élire deux chambres
au suffrage universel direct mais selon deux modes différents, mettre fin au
cumul des mandats dans l’espace et le temps, instaurer des mécanismes de
participation et de contrôle citoyens, réfléchir à un nouveau statut de l’élu…
L’auteur
Emmanuel
Saint-Bonnet, politologue indépendant, bloggeur, professionnel du tourisme
patrimonial et ancien journaliste, anime depuis sa création www.atlaspol.com, l’atlas électoral de la France en
ligne.
Depuis vingt ans il
réfléchit à la gouvernance des collectivités locales. Ce texte reprend en
partie ses contributions à ce long débat, notamment sur Rue 89 Lyon, Newsring
et sur son blog des Artisans-Politologues.