vendredi 1 janvier 2010

Le redécoupage Marleix dans le Gard

Le redécoupage Marleix a été retoqué au Sénat le 14 décembre. En attendant la suite, les Artisans-Politologues continuent l'analyse du texte originel.
Aujourd'hui: le Gard.
Département méridional en pleine expansion démographique, le Gard se voit adjoindre un sixième siège. Mais ce remodelage ne manquera pas d'être taxé de gerrymandering (d'Elbridge Gerry, gouverneur du Massachusetts au début du XIXe siècle, réputé pour avoir donné, à des fins électoralistes, des formes de salamandre aux circonscriptions de son Etat) par les détracteurs d'Alain Marleix, tant les contours des deux circonscriptions nîmoises sont tourmentées.
1ere circonscription (Nîmes-Sud)
De l'ancienne 1ere circonscription ne subsistent que les cantons de Nîmes I, III et VI et celui de La Vistrenque. Les ciseaux d'Alain Marleix lui ont rattaché celui de Beaucaire. Sur la carte, ce secteur comprend le seul canton du département n'étant jamais passé à gauche depuis sa création en 1982, La Vistrenque (en bleu). Ce dernier fait face à quatre cantons penchant plutôt à gauche sur la période 1958-2008 (en orange sur la carte). Cependant, Nîmes I vote à droite depuis 1988 et Beaucaire, la seconde ville du secteur, a échappé à la gauche en 1983. Le député Nouveau Centre sortant, Yvan Lachaud, ne devrait donc pas avoir trop de mal à conserver son siège. Face à lui, le PS pourrait investir le nouveau conseiller général de Beaucaire Juan-Antoine Martinez. Autrefois puissants ici, les communistes pourraient peser dans l'équation, de même que le Front national.

2e circonscription (Vauvert)

En perdant les cantons assez tangents de Beaucaire et Marguerittes, au profit de celui de Sommières, qui n'est jamais passé à droite sous la Ve République (en rouge sur la carte), cette circonscription se rééquilibre légèrement à gauche. Ici aussi, la carte, qui reprend l'évolution 1958-2008, est trompeuse et ne prend pas en compte les mutations sociologiques de ce secteur, en pleine "varisation". Le député UMP sortant, Etienne Mourrut, maire du Grau-du-Roi, peut également s'appuyer sur les deux plus gros réservoirs de vote de la circonscription, Saint-Gilles et Vauvert, deux villes de droite. La dernière fois que le PS a gagné ici, c'était en triangulaire avec le FN, en 1997. En 2002 Etienne Mourrut a gagné la triangulaire, et en 2007 il a remporté son duel contre le PS avec un rapport de près de 60-40, après avoir dépassé les 48 % au premier tour. Il n'est donc même pas sûr que le redécoupage amoindrisse ses réserves.

3e circonscription (Villeneuve-lès-Avignon)
Cette circonscription perd deux cantons globalement à gauche mais ayant un chef-lieu de droite: Pont-Saint-Esprit et Uzès. Ne subsistent que deux cantons ayant globalement voté à droite sous la Ve République, Aramon et Villeneuve-lès-Avignon, deux cantons de gauche, Bagnols-sur-Cèze et Remoulins, et un canton n'ayant jamais basculé à droite depuis 1958, Roquemaure. Cependant, le rapport de force est actuellement défavorable à la gauche, puisqu'elle ne détient que Bagnols et Remoulins. Dans cette vallée du Rhône en pleines mutations sociologiques, les législatives de 2012 pourraient voir s'affronter le député UMP sortant Jean-Marc Roubaud, maire de Villeneuve-lès-Avignon, l'un des fiefs de droite les plus solides du département, et son homologue socialiste de Bagnols-sur-Cèze, ville ouvrière ayant tendance à zapper depuis 1989, Jean-Christian Rey. Tous deux devront garder un oeil sur le FN, dans ce secteur où les triangulaires sont monnaies courantes.
4e circonscription (Alès-Est)
Les ciseaux d'Alain Marleix ont clairement ici écarté les cantons les plus dangereux pour le sortant UMP, Max Roustan. Bessèges, Génolhac et La Grand-Combe, qui ne sont jamais passés à droite sous la Ve République, rejoignent la nouvelle 5e circonscription. Plus au sud, le tracé reste le même que précédemment, laissant à la 5e circonscription ce corridor rouge allant des Cévennes au Vidourle. L'opération écarte surtout Patrick Malavieille, leader communiste ancré à La Grand-Combe, l'un des adversaires les plus sérieux de Max Roustan. Il devrait donc se retrouver au second tour face au PS, qui pourrait investir Chantal Vinot. A gauche, le conseiller écologiste de Saint-Chaptes, l'ancien communiste Christophe Cavard, pourrait aussi se présenter.
5e circonscription (Ales-Ouest)
Le dernier fief de gauche du Gard est renforcé par l'adjonction de Bessèges, Génolhac et La Grand-Combe, qui éclipse le départ de Sommières. Cependant, le député sortant, le socialiste William Dumas, devra composer avec Patrick Malavieille, maire de La Grand-Combe et ancien député PCF de la 4e circonscription. Le redécoupage, en apportant les anciens fiefs industriels du bassin minier cévenol, pourrait renforcer le vote communiste. De quoi placer en embuscade l'UMP Christophe Ruas, qui avait réalisé une bonne performance au premier tour en 2007.
6e circonscription (Nîmes-Nord)
Ce nouveau siège comprend les cantons II, IV et V de Nîmes, le canton péri-urbain de Marguerittes, et celui d'Uzès. La carte montre que la zone est particulièrement indécise: Nîmes II et IV penchent globalement à droite, Uzès et Marguerittes globalement à gauche, et Nîmes V, depuis sa création en 1973, a été détenu durant un nombre égal de mandats par la droite et la gauche. Les rapports de force sont cependant, à l'heure actuelle, en faveur de la droite, élue dans trois cantons sur cinq. En y ajoutant l'impact potentiel du FN, tout est donc possible dans cette nouvelle circonscription. A droite pourrait se présenter l'UMP Franck Proust, proche du sénateur-maire de Nîmes Jean-Paul Fournier, ou le maire divers droite d'Uzès Jean-Luc Chapon. Le PS peut entre autres présenter Bernard Casaurang, conseiller de Nîmes IV, ou son homologue d'Uzès Denis Bouad.
A quoi faut-il s'attendre...
La droite, qui détient actuellement quatre sièges sur cinq, devrait conserver entre trois et cinq sièges. Ses sortants sont très peu menacés dans les 1ere, 2e et 4e. Le jeu semble un peu plus ouvert dans la 3e et surtout la 6e. Si la droite remporte ces deux derniers sièges, le scénario le plus noir pour le PS serait alors la perte de la 5e, au profit cette fois du PCF.
Emmanuel SAINT-BONNET

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