mardi 7 juillet 2009

Réflexe légitimiste à Hénin-Beaumont

Avec 528 voix d’avance, le candidat divers gauche Daniel Duquenne a remporté le second tour de la municipale partielle, qui l’opposait dimanche 5 juillet au FN Steeve Briois. En choisissant cet ancien directeur des services de la mairie, opposé à la politique du maire déchu, l’ancien socialiste Gérard Dalongeville, les électeurs de cette ville du Pas-de-Calais, dans la grande banlieue de Lille, ont joué la carte d’une certaine légitimité, face à l’extrême-droite. Daniel Duquenne présentait également l’avantage de ne pas avoir été associé à la gestion de l’équipe précédente, enfoncée dans les difficultés financières et surtout judiciaires.
Ce facteur, davantage que l’accroissement de la participation entre les deux tours (de 60,15 à 62,37 %), a joué en faveur de la liste de l’Alliance républicaine. Davantage aussi sans doute que la stratégie, toujours aléatoire, du front républicain. Daniel Duquenne a en effet bénéficié du retrait sans fusion des autres listes de gauche, ainsi que du soutien de l’UMP, dont le candidat n’avait même pas atteint la barre des 5 % au premier tour. La lecture des résultats en nombre de voix est à cet égard bien plus parlante que les pourcentages.
Au premier tour, Daniel Duquenne avait attiré 2302 voix (http://une-ville-exsangue-henin-beaumont.kazeo.com/Municipales-2009,r203653.html). La liste FN de Steeve Briois en rassemblait de son côté 4485. Si on retranche ce dernier résultat au nombre total d’exprimés du premier tour, on obtient 6917 voix.
Or, Daniel Duquenne n’en obtient au second tour que 6108 devant les 5450 de Steeve Briois (http://www.lavoixdunord.fr/Region/actualite/Secteur_Region/2009/07/06/article_la-formidable-revanche-de-daniel-duquenn.shtml).
Car entre les deux tours, si 430 voix personnes supplémentaires se sont déplacées (12 059 contre 11 629), seules 158 d’entre elles se sont exprimées. On passe de 227 bulletins blancs ou nuls à 501.
Parmi eux, en dehors des abstentionnistes du premier tour, sans doute des électeurs socialistes frustrés par le retrait de la liste de Pierre Ferrari. Egalement aussi des partisans de droite, tout aussi frustrés de l’élimination de la liste UMP de Nesredine Ramdani, et préférant renvoyer dos à dos MM Duquenne et Briois.
D’autres ont sans doute préférer voter sans état d’âme pour le FN. Car si la participation s’accroît entre les deux tours de 430 bulletins, la liste Briois en gagne 965. A comparer aux 835 suffrages totalisés par les trois listes classées à droite.
Il ne serait pas étonnant d’ailleurs qu’à droite, les moins enclins à voter FN soient issus des milieux économiques. Du moins si l’on en croit les réactions recueillis par différent media chez les commerçants soulignant qu’un maire FN, « ce ne serait pas bon pour les affaires ». A cet égard, l’extrême-droite peut elle aussi être, dans les urnes, victime de la crise économique, malgré certains lieux communs tenaces sur le vote FN.
Malgré sa défaite, le Front national gagne donc des voix, contrairement au Front républicain qui en perd, en dépit de l’accroissement de la participation, et en dépit aussi de ce qu’affirme Jean-Pierre Raffarin sur le site du Nouvel Observateur.
L’Alliance républicaine, comme le FN, en ont pris conscience. Le futur maire Daniel Duquenne n’a pas caché qu’«il faudra reconquérir certains secteurs » de la commune. D’ailleurs, sur 18 bureaux, quatre ont placé Steeve Briois en tête. Et, désormais, le FN fera figure de seule alternative municipale jusqu’en 2014. A moins que…
De l’autre côté de l’échiquier, Marine Le Pen, deuxième sur la liste FN, maintient la pression. Le faible écart de voix avec la liste de Daniel Duquenne, ainsi que certaines déclarations de ce dernier entre les deux tours, l’ont incitée à déposer un recours en annulation du scrutin.
La fille de Jean-Marie Le Pen compte toujours, toutes proportions gardées et dans un contexte différent, rééditer le coup de Vitrolles, lorsque Bruno Mégret, en 1997, s’était finalement imposé après un premier échec de justesse.
Faire passer cette défaite pour une victoire personnelle reste dans son intérêt, dans la course à la succession à la tête du FN, sur fond de déconfiture électorale.
C’est l’une des conséquences de ce scrutin, dont les répercussions dépassent largement le cadre local.
Emmanuel SAINT-BONNET

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