lundi 22 juin 2009

Hénin-Beaumont, un Vitrolles Ch'ti?

Douze ans après la victoire du clan Mégret à Vitrolles, l’extrême-droite a de bonnes chances de faire tomber dans son escarcelle une ville de plus de 10 000 habitants.
Dimanche prochain se tiendra une municipale partielle à Hénin-Beaumont, dans le bassin minier du Pas-de-Calais. Une élection qui fait suite à la démission en bloc du conseil municipal, après la mise en examen, et l’incarcération du maire (divers gauche) Gérard Dalongeville, pour « détournement de fonds publics, faux en écriture et favoritisme ».
Pour ce scrutin, le FN, qui a encore obtenu 27,92 % des voix exprimées sur la commune, pointant ainsi en tête, lors des dernières Européennes, fera face à une gauche complètement éclatée.
Alors que l’ancienne ministre socialiste Marie-Noëlle Lienemann vient de jeter l’éponge, les couteaux sont de sortie. La fédération socialiste du Pas-de-Calais avait dans un premier temps investi le radical de gauche Eric Mouton, en ticket avec le jeune socialiste Pierre Ferrari.
Ce dernier a finalement choisi de monter sa propre liste « arc-en-ciel », allant du PCF au MODEM, comme le rapporte Le Monde (http://www.lemonde.fr/politique/article/2009/06/11/henin-beaumont-cinq-listes-de-gauche-face-a-marine-le-pen_1205868_823448.html).
Il devra compter avec Les Verts, le NPA, l’Alliance républicaine, un petit mouvement de gauche conduit par Daniel Duquenne, candidat présent au second tour lors des municipales de mars 2008 (http://alliancerepublicaine.typepad.fr/mon_weblog/), et l’ancien maire socialiste Pierre Darchicourt, battu en 2001 par Gérard Dalongeville lors d’une primaire sauvage au sein du PS.
L’UMP sera également présente, ainsi qu’une liste divers droite et une autre sans étiquette. Cependant, la droite reste structurellement faible dans le bassin minier.
C’est dans ce contexte que l’extrême-droite a pu prospérer, profitant justement de cette faiblesse, mais surtout du discrédit de la gauche après l’affaire Dalongeville, dans une région Nord – Pas-de-Calais où l’audience d’un PS qui a tendance à se notabiliser s’effrite lentement.
Contrairement à l’écrasante majorité des villes où son implantation est importante, elle a suivi une courbe ascendante. Steeve Briois, qui mènera dimanche la liste FN où Marine Le Pen figure en deuxième position, était candidat en 1995, rassemblant entre 12 et 13 % des suffrages exprimés d’un tour à l’autre.
En 2001, la crise scission mégrétiste n’a pas affaibli l’extrême-droite, loin de là. Sous l’étiquette MNR, Steeve Briois parvient à convaincre 17,49 % des électeurs exprimés au premier tour, et 19,08 au second.
Revenu sous la bannière frontiste, flanqué de Marine Le Pen, il est présent en 2008 au second tour, s’intercalant entre les listes Dalongeville et Duquenne, avec 28,83 %.
Ce dernier résultat et celui des Européennes ne sont pas loin du point de bascule en cas de triangulaire, à savoir un peu plus de 33,34 % des suffrages exprimés. Ce fut le cas notamment lors des municipales de 1995 à Orange (35,93 %) et Toulon (37,02 %).
Cependant, cette élection rappelle davantage celle de Vitrolles en 1997. Après un premier échec en 1995, Bruno Mégret avait réussit à souffler cette commune des Bouches-du-Rhône à une gauche empêtrée dans ses « affaires » et incapable de créer un front républicain avec une droite ici aussi structurellement peu implantée, lors d’une partielle en 1997 remportée par son épouse Catherine.
« Affaires », divisions des forces politiques classiques, faiblesse de la droite, élection partielle, présence d’une personnalité frontiste d’envergure nationale… Les mêmes ingrédients sont réunis à Hénin-Beaumont.
Adoptant un positionnement différent de celui des Mégret, Marine Le Pen joue d’une certaine façon davantage sur du velours, en mettant en avant Steeve Briois, militant implanté de longue date.
Face à elle, le PS semble avoir pris conscience du risque mortel du délitement. La première secrétaire fédérale du Pas-de-Calais, Catherine Génisson, soutient Pierre Ferrari, qui a du préférer inclure le MODEM sur sa liste, plutôt que d’y voir figurer Eric Mouton. L’exclusion du radical était en effet une condition préalable à la présence des centristes (http://www.20minutes.fr/article/331947/Lille-Du-PC-au-MoDem-large-rassemblement-contre-le-FN-a-Henin-Beaumont.php).
Reste à savoir si cet attelage convaincra des électeurs apparemment las des turpitudes de certains de leurs élus.
Nul doute que les résultats du premier tour seront scrutés avec attention dans tous les Etats-Majors de campagne. Si le FN fait aussi bien ou plus qu’en 2008 et qu’aux Européennes, la pression à la fusion va s’avérer très forte sur les épaules de Daniel Duquenne.
A moins que ce candidat, troisième homme en 2008, n’apparaisse comme un recours pour les électeurs de gauche, déjouant alors tous les pronostics, aussi bien pour le premier que pour le second tour de cette élection à hauts risques.
Emmanuel SAINT-BONNET

5 commentaires:

Tellan a dit…

Département où Le Pen est arrivé en tête en 2002, c'est le seul à avoir placé en tête la candidate socialiste en 2007, contrairement au département du Nord.

Je dirais surtout que la vie politique dans le Pas-de-Calais est assez instable depuis une vingtaine d'années. Comme en témoigne le zapping des principales villes du département.

Si la gauche reste largement majoritaire au niveau départemental et que la plupart de ces villes votent à gauche, cela ne lui a pas empêché d'en perdre comme Boulogne sur Mer en 1989 avant de la regagner dans une partielle de 1996. Ville aujourd'hui solidement tenue par le PS Frédéric Cuvilliers. L'ancien fief de Guy Mollet Arras a subi le même sort en 1995 aujourd'hui solidement tenu par le centriste Jean-Marie Vanlerenberghe. Calais a subi le même sort en pleine vague rose de 2008.

Anonyme a dit…

la différence avec Vitrolles, c'est qu'ici, la droite fait de la figuration et ne peut se maintenir au second tour. Je pense qu'il va y avoir un duel au second tour, remporté à au moins 60% par la gauche.

JPG

Anonyme a dit…

Catherine Génisson a adoubé Pierre Ferrari car celle ci en rivalité permanente avec Benoit Hamon a voulu se faire un coup de pub avant que celui ci n'y pense et non par soutien pour Ferrari qui n'a jamais apporté quoi que ce soit à Hénin Beaumont.

Potiche ou plus gentiment acte de présence était le travail de Pierre Ferrari, rien d'autre !

retro427 a dit…

je me suis permis de mettre votre analyse sur le blog
HENIN BEAUMONT - Etats d'âme
Adresse de ce blog:
http://une-ville-exsangue-henin-beaumont.kazeo.com
En effet je partage pleinement votre analyse. C'est vrai que les électeurs d'Hénin Beaumont sont totalement abasourdis par ce qui leur arrive. Difficile désormais de faire confiance aux partis en place tant leur position est nébuleuse.L'appareil des partis a agi dangereusement en 2008 alors que la situation de Dalongeville était connue.Le mettre en tête de liste a été une erreur monumentale qui risque de se payer trés durement

David NOËL a dit…

En réalité, le MoDem n'a pas fait de la présence d'Eric Mouton un casus belli.
Eric Mouton, amer, a préféré quitter l'aventure quand la plupart des colistiers lui ont préféré Pierre Ferrari au grand dam de Catherine Génisson qui avait beaucoup plus de prise sur Eric Mouton que sur Pierre Ferrari.
Eric Mouton, lié par Pierre Georget, premier secrétaire fédéral du PRG, avait par exemple accédé à la demande de Génisson de faire de la place sur la liste à des candidats MRC désignés par Jean-Marie Alexandre et s'engageait à ne pas s'ouvrir au MoDem pour ne pas mettre D. Percheron en porte à faux aux régionales.
Au contraire, Pierre Ferrari a refusé catégoriquement de travailler avec des gens choisis par M. Alexandre qu'il considérait comme un parrain politique de Dalongeville et tenait à l'alliance avec le MoDem, quitte à froisser D. Percheron, qui n'avait pas à se mêler des affaires héninoises.

Loin d'être une potiche, Pierre Ferrari a été un adjoint efficace et est resté avant tout un militant. Il a refusé de sacrifier sa liberté de parole et n'a jamais cautionné la gestion Dalongeville.
Elu de front républicain, il n'était pas un fidèle de Dalongeville, mais un adversaire et constituait, avec Mme Lienemann et avec le PC une opposition interne dans la majorité.